PRAC janvier 2024 : mesures de précaution pour les enfants dont le père a été traité avec un médicament à base de valproate

Date: 02/02/2024

Au cours de sa réunion de janvier 2024, le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance de l’Agence européenne des médicaments a recommandé des mesures de précaution concernant le risque potentiel de troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père traité avec des médicaments à base de valproate. 

Le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (Pharmacovigilance Risk Assessment Committee, PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (European Medicines Agency – EMA) recommande des mesures de précaution pour le traitement de patients de sexe masculin avec des médicaments à base de valproate. Ces mesures doivent répondre à un risque potentiel accru de troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père traité avec des médicaments à base de valproate au cours des trois mois précédant la conception. Les médicaments à base de valproate sont utilisés pour traiter l’épilepsie, les troubles bipolaires et, dans certains pays de l’UE, la migraine.

Le PRAC recommande que le traitement par valproate chez les patients de sexe masculin soit initié et supervisé par un spécialiste dans la gestion de l’épilepsie, des troubles bipolaires ou de la migraine. 

Les médecins doivent informer les patients de sexe masculin qui prennent du valproate du risque potentiel et discuter de la nécessité d’envisager une contraception efficace, tant pour le patient que pour sa partenaire de sexe féminin. Le traitement par valproate de patients de sexe masculin doit être revu à intervalles réguliers afin de déterminer s’il reste le traitement le plus approprié, en particulier lorsque le patient envisage de concevoir un enfant. 

Pour parvenir à cette conclusion, le PRAC a examiné les données d’une étude observationnelle rétrospective menée par les firmes qui commercialisent le valproate en tant qu’obligation faisant suite à un examen antérieur de l’utilisation du valproate pendant la grossesse. Le Comité a également pris en compte des données provenant d’autres sources, y compris des études non cliniques (en laboratoire) et de la littérature scientifique, et a consulté des patients et des experts cliniques.

L’étude observationnelle rétrospective a exploité des données provenant de plusieurs bases de données de registres au Danemark, en Norvège et en Suède et s’est concentrée sur les résultats à la naissance des enfants dont le père prenait du valproate ou de la lamotrigine ou du levetiracetam (d’autres médicaments pour traiter des maladies similaires à celles traitées par le valproate) au moment de la conception. 

Les résultats de l’étude suggèrent qu’il pourrait y avoir un risque accru de troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père ayant pris du valproate dans les trois mois précédant la conception. Les troubles du développement neurologique sont des problèmes de développement qui commencent dans la petite enfance, tels que les troubles du spectre autistique, la déficience intellectuelle, les troubles de la communication, le déficit de l’attention/les troubles de l’hyperactivité et les troubles du mouvement.

Les données ont montré qu’environ cinq enfants sur 100 présentaient un trouble du développement neurologique lorsqu’ils étaient nés de père traité par valproate, contre environ trois sur 100 lorsqu’ils étaient nés de père traité par lamotrigine ou levetiracetam. L’étude n’a pas analysé le risque chez les enfants nés de père ayant arrêté le valproate plus de trois mois avant la conception. 

Le risque potentiel chez les enfants nés de père traité par valproate dans les trois mois précédant la conception est inférieur au risque précédemment confirmé chez les enfants nés de mère traitée par valproate pendant la grossesse. On estime que jusqu’à 30 à 40 enfants en âge préscolaire sur 100 dont la mère a pris du valproate pendant la grossesse peuvent présenter des problèmes de développement dans la petite enfance, tels qu’une lenteur à marcher et à parler, des capacités intellectuelles inférieures à celles des autres enfants, et des difficultés de langage et de mémoire.

Les données de l’étude sur les patients de sexe masculin présentaient des limites, notamment des différences entre les groupes en ce qui concerne les maladies pour lesquelles les médicaments ont été utilisés et les durées de suivi. Le PRAC n’a donc pas pu établir si l’augmentation de l’occurrence de ces troubles suggérée par l’étude était due à l’utilisation du valproate. En outre, l’étude n’était pas suffisamment vaste pour permettre d’identifier les types de troubles du développement neurologique que les enfants pourraient être plus susceptibles de développer. Néanmoins, le Comité a estimé que des mesures de précaution étaient justifiées pour informer les patients et les professionnels de la santé. 

Le risque potentiel de troubles du développement neurologique et les mesures de précaution seront reflétés dans les mises à jour des informations sur le produit et du matériel éducatif pour les médicaments à base de valproate.

Informations pour les patients de sexe masculin

  1. De nouvelles informations suggèrent qu’il pourrait y avoir un risque plus élevé de troubles du développement neurologique (problèmes de développement qui commencent dans la petite enfance) chez les enfants nés de père traité par valproate dans les trois mois précédant la conception, par rapport à ceux nés de père ayant utilisé la lamotrigine ou le levetiracetam. 
  2.  L’étude étant limitée, il est impossible de confirmer que ce risque accru est dû au valproate.
  3. Il est recommandé que votre traitement par valproate soit initié et supervisé par un spécialiste expérimenté dans la prise en charge de votre type de maladie.
  4. Votre médecin réexaminera régulièrement votre traitement par valproate afin de déterminer si celui-ci reste le traitement le plus approprié pour vous et de discuter de la possibilité d’utiliser d’autres traitements pour soigner votre maladie, en fonction de votre situation. 
  5. Par mesure de précaution, votre médecin discutera avec vous :
    - du risque potentiel pour les enfants nés de père prenant du valproate ;
    - de la nécessité d’envisager une contraception efficace (contrôle des naissances) pour vous et votre partenaire de sexe féminin pendant le traitement et pendant les trois mois qui suivent l’arrêt du traitement ;
    - de la nécessité de les consulter si vous envisagez de concevoir un enfant et avant d’arrêter la contraception ;
    - des raisons pour lesquelles vous ne devez pas faire un don de sperme lorsque vous prenez du valproate et pendant les trois mois qui suivent l’arrêt du valproate.
  6. Si votre partenaire de sexe féminin tombe enceinte et que vous avez pris du valproate dans les trois mois précédant la conception, parlez-en à votre médecin si vous ou votre partenaire avez des questions. 
  7. N’arrêtez pas votre traitement sans consulter votre médecin. Si vous arrêtez le traitement, vos symptômes peuvent s’aggraver.
  8. Votre médecin vous remettra un guide du patient à lire. Vous recevrez également une carte patient avec votre médicament, vous rappelant les risques potentiels liés à l’utilisation du valproate.

Informations pour les professionnels de la santé

  1. Il est recommandé que le traitement par valproate chez les patients de sexe masculin soit initié et supervisé par un spécialiste dans la gestion de l’épilepsie, des troubles bipolaires ou de la migraine.
  2. Les professionnels de la santé doivent : 
  • informer les patients de sexe masculin actuellement traités par valproate du risque potentiel de troubles du développement neurologique et déterminer si le valproate reste le traitement le plus approprié ; 
  • discuter avec les patients de sexe masculin de la nécessité d’envisager une contraception efficace, y compris pour leur partenaire de sexe féminin, pendant l’utilisation du valproate et pendant au moins trois mois après l’arrêt du traitement ; 
  • informer les patients de sexe masculin de la nécessité d’un examen régulier par leur médecin afin d’évaluer si le valproate reste le traitement le plus approprié pour le patient et de discuter avec lui des alternatives thérapeutiques appropriées. Ceci est particulièrement important si le patient de sexe masculin envisage de concevoir un enfant et, dans ce cas, avant d’arrêter la contraception ; 
  • conseiller aux patients de sexe masculin de ne pas faire de don de sperme pendant le traitement et pendant au moins trois mois après l’arrêt du traitement ;
  • fournir aux patients de sexe masculin le nouveau guide du patient qui leur est destiné et attirer leur attention sur la carte patient jointe ou incluse dans l’emballage de leur médicament.

Ces mesures de précaution sont basées sur une révision par le PRAC des données provenant d’une étude observationnelle rétrospective (EUPAS34201). Les résultats suggèrent un risque accru de troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père traité par valproate dans les 3 mois précédant la conception, par rapport au risque chez les enfants nés de père traité par lamotrigine ou levetiracetam. 

La méta-analyse des données provenant de trois pays nordiques a abouti à un rapport de risque (hazard ratio - HR) ajusté et groupé de 1,50 (95 % CI : 1,09-2,07) pour les troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père traité par valproate dans les trois mois précédant la conception, par rapport à la lamotrigine ou au levetiracetam. Le risque cumulé ajusté de troubles du développement neurologique a été estimé à environ 5 pourcent dans le groupe valproate contre environ trois pourcent dans le groupe lamotrigine et levetiracetam. Aucune différence au niveau du risque de malformations congénitales n’a été observée entre les deux groupes.

L’étude n’a pas évalué le risque de troubles du développement neurologique chez les enfants nés de père ayant cessé de prendre du valproate plus de trois mois avant la conception. 

Les recommandations précédentes visant à éviter l’exposition aux médicaments à base de valproate chez les femmes pendant la grossesse en raison du risque de malformations congénitales et de troubles du développement neurologique restent en vigueur.

Une communication directe aux professionnels de la santé (direct healthcare professional communication, DHPC) sera envoyée en temps voulu aux professionnels de la santé qui prescrivent, délivrent ou administrent le médicament. La DHPC sera également publiée sur une page dédiée du site web de l’EMA.

En Belgique, les médicaments contenant du valproate sont autorisés et commercialisés sous les noms suivants :

  • Depakine ;
  • Valproate EG ;
  • Valproate Viatris.

Vous trouverez de plus amples informations sur le site de l’EMA.
 

Dernière mise à jour le 02/02/2024